Pour une autre réforme des retraites...0
Réforme : « Rétablissement dans l'ancienne forme, ou dans une forme meilleure ». Ainsi se définissait le mot réforme, dans le dictionnaire Quillet Flammarion » de 1976. -Désolé, je n'avais que celui-là sous la main-Mais qu'entend-t-on quand on évoque la réforme des retraites ? Que ce soit lors des dernières ou pour les prochaines réformes, on n'entend rien de vraiment nouveau ou de meilleur. Les économistes se chipotent, entre un an ou deux, avec le seul leitmotiv du « Il faut travailler plus longtemps ». Alors, ils le jouent aux dés, certains nous font un six et trois, et d'autres un double six... Mais sans que cela ait un sens réel, ou que cela se base sur des certitudes mathématiques. Ils alignent des chiffres des prévisions, qui, l'affirment-ils, tiennent compte de paramètres, mais eux seuls s'y retrouvent. La solution livrée brute est celle-ci : On vit plus longtemps, donc on doit travailler plus. Je pense personnellement que ce n'est pas tout à fait faux, mais que cela nécessite malgré tout, quelques ajustements. Le français moyen invoque une solution autre : Il faut mettre à plat les régimes spéciaux et faire en sorte que tout le monde soit logé à la même enseigne, c'est-à-dire celle sous laquelle personne ne veut se ranger. Alors on accable pêle-mêle les fonctionnaires, les journalistes et les tailleuses de pipes, parce que c'est bien connu, tout ça, c'est de leur faute. Mais, au final... Quoi de neuf docteur ? Et si on tentait d'imaginer une vraie réforme ? ... Un changement qui prendrait en compte une somme de facteurs complètement ignorés jusqu'ici ? On n'écartera pas le côté farfelu de ma proposition, mais si on accepte malgré tout, de se pencher un peu sur le principe, peut-être que cela apparaîtra moins idiot qu'au premier abord. Prenons le premier élément tenace des économistes : Nous vivons plus longtemps, nous devons travailler plus longtemps. Et insérons entre les deux affirmations, au demeurant assez pertinentes, une troisième non moins réaliste : Nous vivons plus longtemps, mais dans un état moins performant, nous devons travailler plus longtemps. Là, la proposition devient boiteuse.... Sauf si on en modifie légèrement la fin : Nous vivons plus longtemps, mais dans un état moins performant, nous devons travailler plus longtemps en nous adaptant à nos capacités. Pour mieux comprendre, penchons-nous sur notre destinée commune et établissons des parallèles : Je suis un bébé, je n'ai pas de connaissance, pas de force, je ne peux pas travailler... La société pourvoit à ma subsistance, je vis sur la solidarité (allocations familiales gratuité de l'éducation, système de soins et de santé...) et sur l'économie de mes parents. Idem pour ma fin de vie, à ceci près qu'à moins que la médecine ait fait de réels progrès, mes parents ne seront plus là, et ce seront mes efforts de cotisation retraite complétés de ceux de mon employeur qui viendront compenser ma nouvelle inutilité productive que sera ma vieillesse. Entre les deux, on voit bien que tout est progressif. Jusqu'à ce que j'intègre réellement le monde du travail, et parce que je ne suis pas encore en compétence physique, je bénéficie de plus de temps de loisirs. Deux mois de vacances l'été, et une semaine toutes les sept au long de l'année scolaire. Et puis vient le temps où je donne à fond, au maximum de mes capacités, une large place au travail et à l'accroissement de la richesse collective. D'où l'idée, puisqu'il faut augmenter ce temps, de revenir à une progressivité dans cette fin d'activité. Plutôt que de tout quitter brusquement, travailler plus longtemps, oui, mais en en diminuant le rythme. Compliqué ? Sûrement, mais pas inintéressant. Imaginons que tout salarié, dès ses 62 ans, bénéficie d'un rythme de travail en baisse. Toutes les formes sont possibles, une semaine sur quatre de repos supplémentaire, ou six semaines de congés de plus dans l'année à répartir comme il le souhaite, ou d'autres montages plus audacieux, peu importe. Et ce, jusqu'à 65ou 67 ans... Avec, pourquoi pas, encore plus de liberté entre les deux âges... Bien entendu, ces libertés supplémentaires ne seraient pas à la charge des entreprises, mais ce serait les caisses de retraite qui les prendraient en charge, sur la base des cotisations encaissées. Avantage : Pour les caisses de retraites, prendre en charge six semaines de pension par an ou 20% du temps de travail à la place de douze mois, c'est une substantielle économie. Continuer à percevoir des cotisations sur le temps de travail allongé des séniors. Pour les salariés : Certes ils travaillent plus longtemps, mais sur un rythme moindre et en conservant un pouvoir d'achat supérieur à leur niveau de pension. La perte de revenus ne s'appliquant que sur les congés de pré retraite. Pour les jeunes : Cela leur offre la possibilité d'une entrée en entreprise pour effectuer les heures laissées vacantes par les seniors. En combinant plusieurs absences on peut même réaliser un partage du travail sans créer de précarité nouvelle. Pour les entreprises : Des économies réalisées sur l'emploi du senior, partiellement remplacé par une main d'œuvre moins qualifiée et donc moins rémunérée. Une transmission progressive du savoir faire. Un accueil progressif et moins contraignant de nouveaux collaborateurs. Avec des seniors moins sollicités, on peut penser réduire l'absentéisme au travail. Pour l'économie : Des seniors, qui restent consommateurs avec un pouvoir d'achat renforcé et qui gardent du temps libre pour les voyages, les sorties, les loisirs... Pour la cohésion sociale : Un échange gagnant entre un allongement du temps de travail et une prise en compte de l'avancée en âge. Chacun contribue selon sa capacité et on réduit ainsi le fossé générationnel. Bien entendu, tout cela peut se décliner avec une dose de volontariat, sur l'âge d'entrée en jouissance de ce droit à dégressivité, ou sur l'utilisation de ces points retraites... On peut légitimement penser qu'il y a un fort aspect complexe à la mise en œuvre d'une telle réforme. Qu'elle demande une technicité précise sur l'intervention de l'ensemble des acteurs, entreprises, caisses de retraites, de pension, de retraites complémentaires... On peut se dire que cela risque de demander du temps... C'est vrai, c'est moins évident que de proclamer : "63 ans pour tous !" Sauf que je rappelle qu'il y a peu de temps, quelqu'un avait dit : "62 et c'est bon pour tous !"
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